L’AUAT partage une analyse de l’évolution de la construction de bureaux dans l’agglomération toulousaine au cours des 70 dernières années. Retour sur les grandes étapes de la production d’immobilier tertiaire aujourd’hui questionnée par un changement de modèle.
Un travail d’observation, engagé dès les années 90 par l’AUAT, permet aujourd’hui à ses membres de bénéficier d’un recensement exhaustif des parcs d’activités économiques de la grande agglomération toulousaine.
Avant 1950 : peu d’immeubles de bureaux dans l’agglomération toulousaine
On identifie une soixantaine d’immeubles de bureaux de plus de 500 m² construits avant les années 50 pour une surface totale de 150 000 m². Avant 1950, ils se destinaient essentiellement à l’administration et aux grandes entreprises publiques implantées dans le centre ancien de Toulouse.
De 1950 à 1970 : peu de nouveaux bureaux, avec une économie encore largement industrielle
Entre 1950 et 1970, la production de bureaux est encore faible. L’activité tertiaire se concentre essentiellement en cœur de ville. Les dynamiques de périurbanisation n’ont pas encore grignoté les franges urbaines toulousaines. Le développement des télécommunications suscite néanmoins de nouveaux besoins en immobilier. Certains grands groupes, comme la direction générale de la Poste, cherchent de plus grands espaces au nord de la ville pour y accueillir ses effectifs. Les effectifs du secteur tertiaire augmentent rapidement durant cette période. Mais elle reste souvent associée aux sites de production des entreprises dans une société encore très industrialisée. Pourtant, de plus en plus d’entreprises souhaitent exprimer une forme de modernité en installant leurs activités de services et de gestion dans des bâtiments indépendants. Une vingtaine d’immeubles sont construits pendant ces deux décennies, pour un volume d’environ 100 000 m².
Les bureaux de demain seront différents de ceux que nous connaissons aujourd’hui. Outre le questionnement sur l’utilité des espaces de travail du fait de l’essor du télétravail, le décret tertiaire a bien dessiné une nouvelle trajectoire pour les bureaux. Sommés de réduire l’empreinte carbone du patrimoine immobilier, les bailleurs sont aujourd’hui amenés à changer de modèle pour proposer des espaces à la fois plus sobres – crise énergétique oblige – et conviviaux.
De 1970 à 1990 : le développement des grands pôles tertiaires sur l’agglomération toulousaine
A partir de 1970, l’économie se tertiarise massivement et va bouleverser le paysage de l’agglomération toulousaine. La modernisation de l’économie se traduit par des phases de production intenses d’immeubles de bureaux en périphérie du centre ancien. Dès la deuxième moitié des années 70, les premiers programmes immobiliers de bureaux voient le jour sur de nouveaux pôles économiques définis dans le cadre du Schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme. Quelques grandes entreprises s’y implantent, préfigurant déjà la spécificité monofonctionnelle des grands pôles tertiaires de l’agglomération.
Le premier à voir le jour est celui de la Cépière à proximité de l’hippodrome de Toulouse. Dans la continuité, Basso Cambo développe sa première phase avec notamment l’entreprise Siemens qui s’y établit. Puis le sud-est avec Labège Innopole et surtout l’arrivée du CNES sur le parc d’activités de Rangueil qui s’inscrit dans la politique de métropoles d’équilibre décidée par l’Etat. D’autres grandes écoles et centres de recherche suivront. En 1980, le site industriel de Matra Space s’implante sur Le Palays dessinant les contours d’une grande aventure spatiale pour le secteur. Enfin, Airbus industries est créée et déploie son ingénierie autour de l’aéroport de Toulouse-Blagnac, futur complexe aéronautique mondial.
Près de 220 immeubles de bureaux sont construits entre 1970 et 1990 pour un volume de près de 800 000 m² supplémentaires.
De 1990 à 2010 : les années fastes de la production de bureau
Sur la lancée des deux décennies passées, le parc poursuit son extension et renforce son organisation multipolaire. La crise des années 90 entraîne une chute brutale de la construction d’immeubles de bureaux. Celle-ci est rapidement compensée par un boom sans précédent de production tertiaire au tournant du 21ème siècle.
Le modèle économique change. Les multinationales expriment des besoins de grands espaces et souhaitent regrouper leurs effectifs sur des sites uniques. Les immeubles sont plus grands, plus hauts et plus denses. De nombreux programmes immobiliers dépassent les 20 000 m². Aussi, la relance et l’activité économique florissante de l’agglomération installent un climat de confiance chez les investisseurs qui lancent de nombreuses productions en blanc (construction sans qu’aucune vente n’ait été conclue au préalable avec un utilisateur). Les activités d’ingénierie de la filière aéronautique s’installent au nord-ouest. Le plan Power 8 de 2007 renforcera cette concentration des activités d’Airbus et de ses sous-traitants autour de la plateforme aéronautique. Le centre historique se densifie autour des grandes administrations, tandis que les pôles historiques de périphérie continuent leur développement comme à Basso-Cambo ou encore Labège-Innopole sur un modèle de campus à l’anglo-saxonne. De nouveaux pôles apparaissent au cours de la période : Andromède, Bordelongue, l’Oncopole avec la construction du site Pierre Fabre, et les prémices du pôle de Balma-Gramont.
Entre 1990 et 2010, 580 immeubles de bureaux ont vu le jour à l’échelle de la grande agglomération pour un volume total de 2 200 000 m² de surfaces de plancher.
2010-2022 : un changement de paradigme
Depuis 2010, la production de surfaces de bureaux reste importante. Elle s’insère de manière relativement homogène sur l’ensemble des pôles de l’agglomération. De grandes opérations publiques de renouvellement urbain participent à la modernisation du parc : Toulouse Aerospace, la Cartoucherie, en attendant le futur projet Grand Matabiau-Quais d’Oc visant à renforcer le poids du centre-ville. Le modèle de l’immeuble tertiaire évolue au gré des nouveaux besoins des entreprises.
Les nouvelles formes de travail génèrent des immeubles plus petits mais aussi plus innovants, plus économes et tournés vers le confort des salariés. Une nouvelle génération d’immeubles apparaît tels que des campus (Orange à Balma, Latécoère à la Roseraie), des tiers-lieux (La Cité à Montaudran, Now Living Space à Saint-Martin), des coworkings (InSitu à Blagnac) répondant à une hybridation des lieux de travail de plus en plus prégnante. Plusieurs centaines de milliers de m² sont d’ores et déjà programmés, soit au sein d’opérations publiques, soit sur des programmes privés.
Depuis 2010, 228 immeubles ont été construits. Le parc s’est agrandi de près de 900 000 m².