Bail réel solidaire : une solution pour l'accession abordable ?
Leclat Brs Leschalets

Bail réel solidaire : une solution pour l’accession abordable ?

Bail réel solidaire : une solution pour l’accession abordable ?

Face à la crise de l’accession à la propriété, le bail réel solidaire (BRS) séduit par ses atouts : un prix d’achat inférieur de 20 à 30% et un cadre anti-spéculation. Retour sur les promesses et les défis de ce dispositif, débattus lors de notre rencontre des observatoires.

Qu’est-ce que le BRS ? C’est un dispositif immobilier créé en 2015 sur le terrain. « Un amendement à la loi ALUR a offert un moyen d’adapter en France le dispositif américain des Community Land Trusts » a expliqué Helène Morel, chercheuse au Lab’URBA et autrice d’une thèse sur le sujet, en ouverture de la rencontre. Depuis et au fil des retours d’expériences, ce dispositif crée une offre pérenne de logements abordables, particulièrement en zones tendues.

Dissocier le foncier du bâti, prix abordable et encadrement de la revente

La particularité du BRS tient en trois points. Le premier est qu’il implique une dissociation foncier/bâti. L’acquéreur devient propriétaire du bâti (le logement), mais pas du terrain. Celui-ci reste la propriété d’un organisme de foncier solidaire (OFS). Deuxième particularité : le prix d’un bien acquis via un BRS est inférieur à celui d’un logement équivalent sur le marché libre. Enfin, troisième point : lors de la revente, le prix est encadré pour maintenir le caractère abordable pour les futurs acquéreurs.

Le BRS en pratique :

  • Le ménage signe un bail de 18 à 99 ans avec l’OFS et dispose de droits réels sur le logement.
  • Il paie une redevance modeste pour l’usage du terrain (généralement 1,5 à 3€/m²/mois).
  • Il peut revendre son logement à tout moment, avec une plus-value limitée et encadrée.
  • Le dispositif est réservé aux ménages modestes sous plafonds de ressources.

Un dispositif en développement dans l’aire d’attraction toulousaine

Malgré un démarrage plus timide qu’ailleurs en France, le dispositif du BRS est désormais en développement en Occitanie. Deux tiers de l’offre recensée sont actuellement en projet à différents stades d’avancement (montage, commercialisation…).  Dans l’aire d’attraction de Toulouse, son essor est lié au développement des OFS locaux. Il est lié aussi à la hausse continue des prix sur le marché libre et aux difficultés de financement rencontrées par les ménages les plus modestes. La ville-centre de Toulouse accueille la majorité de l’offre en BRS. Près de 400 logements ont été mis en vente selon les données présentées par Pauline Jolly et José Sanchez, chargés de projets à l’AUAT.

L’offre de BRS tend à se développer progressivement sur des communes de première et deuxième couronne comme Cugnaux ou Fenouillet. Si cette offre se développe principalement sur les communes soumises à la loi SRU, elle ne vient pas pour autant pallier un état de carence.

Au sein de l’aire d’attraction de Toulouse, l’offre en BRS est majoritairement portée par des bailleurs sociaux (80 %). Une diversification est à l’œuvre depuis 2021, avec une implication croissante des promoteurs privés. Ils portent désormais un quart de l’offre en projet.

Des prix inférieurs d’environ 30% par rapport au marché libre

Concernant les prix d’acquisition, les logements proposés localement en BRS sont environ 30 % moins cher que le marché libre. Le prix médian observé est de 2 900 €/m² (parking inclus). Si une hausse modérée (+6 % entre 2020 et 2024) est constatée, elle reste inférieure à celle du marché libre conventionnel.

A partir de l’analyse d’une opération type sur la commune de Toulouse, José Sanchez a précisé : « les acquéreurs de ces biens sont majoritairement des ménages de petite taille aux revenus modestes (environ 19 000 €/an) et souvent issus du parc locatif privé. Cela confirme le rôle que cette offre peut jouer dans les parcours d’accession des ménages modestes. »

Votre structure est membre de l’AUAT ? Consultez l’état des lieux complet présenté par l’AUAT en vous rendant sur l’espace membres / Ressources / Habitat.

Les atouts du BRS : sécurité et pérennité

Plusieurs intervenants de la rencontre ont souligné les points forts du dispositif. La sécurité pour les ménages tout d’abord. Le BRS est présenté comme « le produit immobilier le plus sécurisé, selon Florence Mizzi, cheffe de projet stratégie foncière – habitat/OFS- Toulouse Métropole, puisqu’il inclut une clause de rachat par l’OFS en cas de difficulté de revente ». Le maintien du caractère abordable des biens sur le long terme ressort également comme l’un des principaux avantages du dispositif. Selon la chercheuse Hélène Morel « la dissociation foncier/bâti permet de garantir l’efficacité des fonds publics investis dans cette offre, tout en permettant à plusieurs générations de ménages d’en bénéficier. »

Le manque de notoriété, premier frein au dispositif BRS 

Malgré son potentiel, le BRS se heurte à plusieurs obstacles. Le premier d’entre eux est la méconnaissance du dispositif. « Grand public, conseillers bancaires et notaires sont encore peu informés, ce qui freine l’adhésion » a souligné Pierre Marchal, directeur général d’Occitalys Foncier, l’OFS du groupement des Châlets.

La complexité administrative et juridique a également été l’objet de débats entre les participants. « L’inexistante d’une fiscalité favorable, comme l’exonération partielle de taxe foncière par exemple, créée une différence avec d’autres produits d’accession abordable tel que le PSLA » a indiqué Gwenola Klopp-Tosser, première adjointe au maire de Castanet-Tolosan. « La croissance globale des recours sur les permis de construire est une autre difficulté » a-t-elle ajouté. La rareté et le coût du foncier en particulier dans les zones tendues ont aussi été discutés. Enfin, les participants ont évoqué l’impact de la taille des opérations sur leur viabilité :  les projets de petite envergure (moins de 20 logements) sont difficiles à équilibrer.

Un dispositif porteur pour l’avenir, à plusieurs conditions

Les intervenants se sont accordés sur plusieurs conditions de réussite pour le développement de l’offre de logements en BRS. Parmi ceux-ci : l’amplification de la communication et de la formation des acteurs. Autre point important : adapter les documents d’urbanisme et de planification pour favoriser le BRS. L’exemple d’inscrire un objectif de 10 % de la production en accession sociale a été donné. Le maintien d’un portage public fort est également apparu important pour les intervenants. Objectif : éviter un détournement du dispositif vers des publics plus aisés. Enfin, des débats ont eu lieu sur la sécurisation du financement via des subventions et l’accès au PTZ pour les acquéreurs successifs.

Un souhait commun : redonner au logement sa vocation première

Tous les intervenants se sont rejoints sur un point : le BRS permet à l’accession à la propriété de renouer avec sa fonction première, à savoir faciliter l’accès au logement pour les ménages. Il leur offre également la possibilité de constituer une épargne garantie. Le BRS contribue ainsi à freiner la logique spéculative qui s’est emparée du logement depuis plus de 30 ans.

Crédit photo : Christophe PICCI – Groupe des Chalets.

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