Entreprises, collectivités, habitants : la sobriété en débat 
Agence d'urbanisme et d'aménagement Toulouse aire métropolitaine

Entreprises, collectivités, habitants : la sobriété en débat 

Notre rencontre des observatoires du 25 avril a signalé la diversité de sens de la notion de « sobriété » et des pratiques qui en découlent. Etat, collectivités, entreprises et citoyens : tous sont interpellés par le partage des responsabilités. 

Entreprises, collectivités, habitants : la sobriété en débat 

Notre rencontre des observatoires du 25 avril a signalé la diversité de sens de la notion de « sobriété » et des pratiques qui en découlent. Etat, collectivités, entreprises et citoyens : tous sont interpellés par le partage des responsabilités. 

Portée par les politiques publiques depuis 2022 en lien avec la crise énergétique, la sobriété conduit à réinterroger nos besoins à la source et les manières de les satisfaire. L’enjeu étant de réduire notre (sur)consommation d’énergie et de ressources. 

Fil rouge de l’observation territoriale de l’agence en 2023 et 2024, « ce concept protéiforme appelle un cheminement, forcément pluriel, car il y a une multitude de manières de s’engager dans la sobriété » introduisait en début de rencontre Agnès Domingo, responsable de l’observatoire environnement de l’AUAT. Devant des participants représentants d’entreprises, de collectivités, d’universités mais aussi de citoyens, les intervenants ont évoqué leurs perceptions de cette notion, mais aussi ses limites.  

La sobriété vue par les habitants : premières conclusions d’une nouvelle étude de l’agence 

Claire Gellereau, chargée de projets du pôle cohésion sociale et attractivités de l’AUAT, a partagé les premiers éléments d’une étude sociologique menée en 2023 sur la sobriété des usages d’habitants. 40 habitants de 4 territoires de l’aire métropolitaine de Toulouse ont révélé à l’agence leurs perceptions de la sobriété, ce qu’ils font en la matière et pourquoi. « En écho au baromètre sobriétés et modes de vie de l’Ademe, notre étude montre que le terme de sobriété n’est pas évident pour tout le monde » résume Claire Gellereau.  

Le premier enseignement retiré de l’étude est que l’appropriation de la notion de sobriété diffère selon la position sociale. Pour les habitants des catégories populaires, ayant parfois connu des parcours de vie complexes, la sobriété n’est pas corrélée aux enjeux écologiques. Les habitants des catégories moyennes supérieures sont quant à elles plus à l’aise avec la notion et identifient des moyens pour agir.  

Deuxième enseignement : le terme de sobriété est connoté plutôt positivement. « Cela va à l’encontre de la conclusion baromètre de l’ADEME (41% de perception positive) : nous l’expliquons par le mode d’enquête qui conduit le répondant à expliquer son point de vue plus en détails qu’il ne le fait en répondant « oui ou non » à un questionnaire en ligne. Pour notre panel, la sobriété est vue comme importante et bénéfique pour notre avenir » explique Claire Gellereau. 

3 types de comportements en matière de sobriété

Troisième enseignement :  il y a un écart entre le discours et la réalité des pratiques. Si 82% des répondants au baromètre Ademe estiment que leur mode de vie est sobre, l’étude AUAT révèle plus de complexité. De manière un peu schématique, trois comportements peuvent être distingués :  

  • Le ménage très à même de parler de sobriété, qui s’estime sobre, alors que son mode de vie l’est peu : il vit dans un grand logement sous-occupé, dispose de plusieurs voitures et de nombreux équipements, effectue des trajets de longue distance…  
  • Le ménage qui est dans le processus d’alignement de ses pratiques avec son discours, qui réduit ses équipements (voiture, électroménager…), ses consommations et se déplace différemment.   
  • Le ménage qui pratique la “frugalité sans intention”, par restriction budgétaire : il habite dans des petits logements, se déplace en transports en commun ou à pied car il n’a pas forcément de voiture et consomme peu.  

Veillons à ne pas s’arrêter au discours et aux intentions sur la sobriété. Pour évaluer sa réalité : il faut mettre en regard les déclarations des habitants avec leurs pratiques », 

Claire Gellereau, chargée de projets du pôle cohésion sociale et attractivités de l’AUAT 

L’étude menée par l’AUAT a été conduite auprès de 4 groupes de 10 habitants de 4 territoires différents (équipements, services, profils sociologiques) : Albi, quartier de la Madeleine ; Balma, quartier Vidailhan ; Castanet-Tolosan, quartier centre-ville ; Toulouse, quartier de Bagatelle. Les conclusions détaillées de l’étude seront publiées d’ici fin 2024.  

« L’exemplarité de la collectivité est un levier important » 

Bruno Paris, vice-président de Lorient Agglomération en charge de la transition écologique, a partagé son retour d’expérience. « Nous avons fait une étude sur la perception de la sobriété par les agents territoriaux, pour ensuite mesurer le niveau d’engagement effectif et celui à venir. Cela nous a conduits à enrichir des fiches-actions du projet de territoire. Un schéma de promotion des achats responsables a été réalisé et notre programme local de l’habitat a intégré la sobriété comme fil rouge. La formation des agents se poursuit, tout comme notre plan de résilience énergétique. »  

Bruno Paris a également présenté un projet récent d’accompagnement d’un panel d’habitants, via le projet « en toute simplicité ». Celui-ci vise à apporter de la connaissance en mettant en situation de test des habitants pendant 6 mois. La finalité est de les orienter vers des modes de vie plus sobres et si possible plus heureux. 

Interpellé par un participant de la rencontre sur la responsabilité individuelle et celle des entreprises, Bruno Paris a invoqué le besoin de cohérence en partageant son point de vue. « C’est à titre individuel, par ses choix de consommation, que l’on fait ou non la réussite d’une entreprise. Il est aussi probable qu’en s’engageant en sobriété, un individu constitue une part d’épargne. La question étant ensuite de savoir si cette épargne ne génère pas une consommation rebond, et si cette consommation est sobre. On pourrait imaginer que cette épargne permette d’accéder à une alimentation plus locale, plus chère, pour que les agriculteurs puissent vivre plus décemment par exemple. » 

« Questionner les habitudes d’achat et encourager le télétravail »  

Pascal Chicot, vice-président biodiversité, transition énergétique et projet alimentaire de territoire du Sicoval, a présenté un outil déployé par l’intercommunalité : le Monopoly des achats. « Ce plateau de jeu nous conduit à interroger chaque opportunité d’achat pour, soit éviter la commande, soit la mutualiser entre services de la collectivité, soit la différer. » En matière de sobriété énergétique, le Sicoval s’est appuyé sur le plan national et les recommandations de l’AMF et de l’ADCF. 30 actions prioritaires sont engagées, telles que le décalage de la mise en route du chauffage, ou l’arrêt des ventilations dans les locaux lorsqu’ils sont inoccupés ». Pascal Chicot a aussi évoqué le télétravail des agents de la collectivité. Avec 350 personnes concernées, 1 jour de télétravail en moyenne par semaine, sur 47 semaines par an, permettent d’économiser 107 tonnes de CO2 qui seraient générées par 1 aller-retour en voiture de 2X15 km…   

« Sobriété :  l’action de l’Etat et l’accompagnement aux changements des pratiques des individus sont nécessaires » 

Revenant sur les conclusions du rapport « Faire sa part » paru en 2019, Thibault Belin, consultant à Carbone 4, a donné des ordres de grandeur sur la responsabilité de l’Etat, celle des entreprises et des individus pour atteindre la neutralité carbone. Il a notamment insisté sur le rôle prépondérant des pouvoirs publics, en tant que régulateurs de l’action publique dans divers secteurs (logement, transports, industrie, agriculture…). Il a également évoqué la nécessité d’amener les entreprises à respecter les quotas de verdissement des flottes de véhicules : « Ce sont aujourd’hui les particuliers qui agissent sur ce point, plus que les entreprises », a-t-il ajouté. 

Deborah Mougin, coordinatrice des programmes environnement d’Unis-Cité, a partagé d’autres exemples de freins à la sobriété. La difficulté de mobiliser le public dans le cadre d’animations en fait partie. L’association rencontre aussi des objections de principe du type « Je trie mes déchets, pourquoi faire plus ? ». Face à cela, Unis-Cité accompagne et forme ses volontaires en service civique pour les aider à porter le discours de la protection de l’environnement. L’enjeu est aussi d’adopter des pratiques de consommation plus sobres, comme le soutiennent les projets MediaTerre et le programme Solidarité énergie. 

« Inciter et valoriser les initiatives des salariés » 

Florence Desarnaud, responsable RSE d’Eurécia, a évoqué la responsabilité de l’entreprise et son engagement via une évaluation indépendante de ses actions, sur la base de la norme ISO 26000. « L’évaluateur d’AFNOR Certification a rencontré les équipes, il a compris ce qu’on vivait et ce qu’on faisait. » Elle a aussi indiqué toute l’importance accordée à la sémantique, en évoquant « l’impact positif » des équipes et de l’entreprise, plutôt que le terme de sobriété. Ce dernier ne faisant pas l’unanimité parmi les acteurs du secteur privé. L’une des premières actions a été d’engager les idées proposées par les équipes. Parmi les freins observés par Eurécia, Florence Desarnaud a expliqué que « certains collaborateurs peuvent dire que c’est à la tête de l’entreprise de faire, ce qui est paradoxal car l’entreprise est formée par l’ensemble des salariés… » 

Votre structure est membre de l’AUAT ? Retrouvez le replay et les supports de la rencontre sur l’espace membres / ressources / Environnement

Partager  :

commerce
économie
habitat
environnement
population
mobilités
foncier
commerce
économie
habitat
environnement
population
mobilités
foncier