L’AUAT a organisé le 10 mai un séminaire prospectif sur le télétravail. Objectif : questionner les futurs possibles des territoires transformés par les nouvelles organisations du travail. Retour sur les grands messages délivrés par les intervenants.
« Dans un monde peu lisible, imaginer un autre demain peut nous aider à nous préparer aux changements au regard de ce que l’on sait et de ce que l’on souhaite, tout en faisant preuve de discernement. Pour nous qui planifions nos territoires à 10 ou 20 ans, réfléchir sur le télétravail et ses impacts permet de lier les enjeux territoriaux et sociaux. Cette nouvelle organisation du travail a des impacts sur les rythmes de vie, les configurations de logement, les rapports au travail et les organisations spatiales. »
Bruno Marzloff, grand témoin de la matinée
« S’interroger sur ce que le travail fait à la ville est essentiel pour comprendre ce qu’il se passe. Le travail est en état de chaos depuis le Covid-19 et la poussée de contestations très puissantes en France. Il est essentiel pour les territoires d’envisager comment habiter mieux, comment satisfaire à des exigences de mode de vie, de maîtrise des organisations du temps et de réduction des impacts environnementaux. Alvin Toffler, dès 1973, relevait l’aberration de déplacer des millions de personnes vers des zones de travail puis chaque soir vers leur domicile. Le modèle fordiste a explosé puisqu’on ne peut plus développer côte à côte une zone de commerce, une zone d’habitat, une zone de loisirs et des voitures pour relier le tout. L’urbanisme fonctionnel a trouvé ses limites : il faut trouver des modes de reliance, de réseaux, qui permettent de renouveler l’accessibilité des territoires. »
Télétravail, immobilier, mobilités : partage des tendances
L’AUAT a partagé un état des dynamiques en cours sur les pratiques de télétravail, l’évolution de l’immobilier d’entreprise, des mobilités et des modes de vie.
Téléchargez la présentation de l’AUAT.
Regards croisés d’acteurs du territoire
Christophe Salvignol, directeur environnement du travail et référent télétravail d’Orange Grand Sud-Ouest
« La principale difficulté pour déployer le télétravail a été et demeure d’accompagner les managers pour que les équipes travaillent différemment au bureau et à distance. Quand on vient sur site, que va-t-on faire ensemble ? Une venue au site se prépare, s’annonce en amont. On souhaite que les salariés soient présents sur le site 2 jours par semaine pour se prémunir de l’isolement et maintenir La force du collectif. C’est pourquoi à Toulouse nous avons construit des sites accueillants, avec – beaucoup d’installations favorisant le travail ensemble. »
Isabelle Ricard, déléguée syndicale CFDT Haute Garonne
« La CFDT avait mené une enquête sur le travail en 2016 qui indiquait que 70% des participants disaient rire au travail et que 77% s’entraidaient. Obtiendrait-on les mêmes résultats aujourd’hui ? On voit aussi que le télétravail est vécu comme un moyen de faire des économies, notamment concernant le transport. On voit aussi que cela permet de travailler plus efficacement pour certaines tâches. Il faudra à l’avenir continuer à faire attention à l’explosion du nombre d’heures travaillées. La porosité entre vie professionnelle et vie personnelle est aussi une question importante. »
Pascal Rassat, consultant spécialisé télétravail et tiers-lieux, Citica
« Le télétravail à temps plein ne marche pas, il vaut mieux parler de travail hybride, mêlant présentiel et distanciel que de télétravail. Dès qu’une organisation passe à une majorité du travail à distance, on observe une perte du liant, du collectif. Cela implique aussi de revoir les règles de travail car on ne peut faire comme si c’était la même chose de travailler au bureau, en coworking ou à domicile. Autre observation : il faut réinterroger les outils du travail pour favoriser le collaboratif à distance. »
Clément Cayla-Giraudeau, directeur de l’Agence d’Ariège Attractivité
«En Ariège, nous avons l’enjeu d’accueillir des télétravailleurs dans des conditions favorables. Nous avons aussi comme point de vigilance de contribuer au rééquilibrage des territoires, avec un travail hors bureau qui permet de ramener de la vie dans des territoires ruraux. Concernant les tiers-lieux, qui demeurent un pari, nous réalisons des études poussées en amont, avec des méthodes participatives pour identifier des zones favorables, mais aussi des projections démographiques. Cependant, il faut bien avoir conscience que les tiers lieux ne sont pas des remèdes miracles face à la désertification des territoires. »
Quiz prospectif : à chacun ses préférences pour télétravailler en 2035
Tous les participants ont ensuite exprimé leurs souhaits idéaux pour travailler en 2035. Quel mode de travail choisiraient-ils ? Dans quel logement et dans quel territoire ? Comment se déplaceraient-ils ? Quel usage du numérique auraient-ils ? Chaque mini-récit était assorti de réponses possibles pour laquelle les participants pouvaient voter. Trois conditions rêvées de télétravail ont ainsi émergé des débats.
Des scénarii sur les environnements de travail en 2030
« Nous avons dessiné 5 futurs possibles avec Futuribles. Il s’agit d’une narration à horizon 2030 qui peut aider les acteurs de la société à se projeter et à interroger le rôle de chacun dans l’avenir, pour prendre ses responsabilités, pour se mettre en route vers un futur soutenable. »